Par Gabrielle.
Gabrielle*, femme juive ambitieuse de 26 ans, j’ai souvent rencontré les difficultés à allier ambition, engagement et judaïsme. Aujourd’hui associée à Yossef*, mon héros et bourreau, j’espère partager avec vous les miracles mais aussi les aléas d’un parcours sans limite et sans barrière où j’ai dû passer par la fenêtre devant des portes trop souvent fermées.
Comment être une femme dans un monde où les règles sont faites par les hommes ?
J’ai toujours lutté contre les préjugés simplistes et féministes, les causes trop démagogues. Je ne sais pas s’il s’agit de mon ego qui me dit, “Moi, je ne vais pas me réduire à mon sexe mais à ce que je suis », ou à un esprit de contradiction.
Je ne voulais pas être une femme dans un monde d’hommes, mais juste Gabrielle, une femme accomplie et surtout crédible et compétente.
Je me désole d’avoir été heurtée à plus fort que moi. Ce qui avait fait ma singularité, être une femme dans un milieu masculin, m’a sauté au visage.
Tout d’abord, si nous sommes intéressantes et intelligentes, il faudrait que l’on soit au moins modeste et docile. Un homme a du charisme, une femme est au mieux prétentieuse, au pire exigeante et limite chieuse voire même hystérique et parano.
J’ai commencé mon constat à travers mon parcours associatif et politique. Après de longues études de sciences politiques, j’ai pourtant choisi le business en m’associant avec l’homme que j’admirais le plus et qui devait m’admirer. Il était le premier homme à m’avoir parlé argent comme à son égal. J’avais entendu pour la première fois : “On va faire du business toi et moi. “
Je travaille aujourd’hui au quotidien avec lui. Nous gérons ensemble une entreprise de conseils*. A côté de cela, nous créons des entreprises au gré de nos envies. Cela m’épanoui terriblement mais me terrifie en même temps.
Je me suis confrontée à encore plus douloureux que le combat contre les autres : le combat contre moi-même. Alors que mon esprit me dictait d’être sans émotion, mon déterminisme naturel faisait pleurer mon cœur. Comment soutenir autant un homme? Comment faire autant de projets ensemble ? Comment lui faire confiance sans l’aimer ? Comment trouver la frontière quand on construit ensemble un quotidien ?
Il m’avait gommée de l’histoire.
J’envie ce pouvoir si masculin de savoir compartimenter. Je déteste ces preuves de faiblesse qui me montrent tous les jours que ma tête réfléchit avec mon cœur. Je n’ai pas su être de glace. J’ai travaillé et je me suis donnée avec tout ce que j’avais et ce que je n’avais pas. J’ai mené chaque projet, obtenu tout ce qu’il fallait obtenir et consacré mon temps, mon énergie et mon amour à une équipe, à un binôme en espérant peut-être un retour.
Mon associé, Yossef, est un homme qui a quelque chose en plus. Je lui dis souvent que si tant de gens le trouvent si beau c’est parce qu’il a une âme différente. Il vit en suivant ses rêves qui ne sont jamais assez hauts pour le rêve d’après.
Toute personne qui le rencontre peut voir en lui cette particularité qui le caractérise.
Je me rendais tous les jours au travail avec passion. Je le regardais avoir une idée avec fierté et admiration pour un travail que j’avais en réalité moi-même effectué. Je souriais de le voir heureux et ambitieux.
Il est alors d’autant plus dur de se confronter à nos différences intrinsèquement naturelles. Si nous étions deux hommes, nous serions meilleurs amis et presque frères, si nous étions deux femmes, nous serions peut être rivales. Mais aujourd’hui que dois-je être pour lui ? Je ne serai jamais son égale en affaires et si je ne fais pas partie de sa vie, où est ma place ?
Encore dernièrement, j’ai voulu soutenir Yossef en lui obtenant tout un article sur son projet fétiche, son bébé. Quelle ne fût pas ma surprise quand dans la description du projet envoyée au journaliste, je n’y figurais pas. Il m’avait gommée de l’histoire.
Ou quand un de mes clients me confie que mon associé pense que c’est Dieu qui lieu fait rentrer des clients. Yossef ne sait donc pas que c’est moi qui les fait venir ?
Et arrive alors le moment où on t’as tout pris, où ton corps ne suit plus et où l’énergie que tu as mise jusque-là n’est pas reconnue. Quand on a essoré toutes tes ressources et que tu te livres enfin, là, on te rappelle des règles qui n’existaient pas quand ça lui profitait à lui. On te met à la benne tel un sapin de Noël un 15 janvier.
J’ai alors dû m’aligner à des limites humiliantes qui n’avaient comme seul but que de lui redonner le pouvoir.
Les hommes oublient vite toutes les fois où ils se sont reposés sur des femmes et leur font oublier qu’elles sont, dans certains cas, plus fortes qu’eux. Car minimiser les femmes c’est garder un pouvoir sur elles.
Ils disent qu’il faut être professionnelle avant tout… Mais qui définit le professionnel ?
Qui fait les règles ?
*Les prénoms et le domaine de travail de l’entreprise ont été changés.